Nous étions environ 500 à participer. Chacun d'entre nous recut un t-shirt, un gobelet en plastique, un smiley réfléchissant, de la crème solaire et un gel de massage.
L'aventure a commencé par un déjeuner chez Paul, qui nous avait concocté un excellent couscous. Lloyd, un copain anglais de Paul, avait fait le déplacement depuis la France pour faire cette marche. Ils m'ont bien fait rire quand ils ont commencé à faire leur sac, se disputant comme un vieux couple sur ce qu'ils devaient emmener comme oranges, pommes, bananes et fruits secs, partagés entre avoir de quoi se nourrir et porter un sac léger...
A Gracia, nous avons rejoint 2 autres amis de Paul, Alex, mi belge mi catalan, et Ana, américaine.
J'étais surprise de voir combien de personnes ressemblaient à de vrais pros, portant des batons télescopiques de marche et nous faisant paraitre comme les vrais amateurs que nous étions...Je me suis rassurée en me disant que les apparences extérieures ne comptaient pas, ce qui était important, c'était ce qu'on avait à l'intérieur... On est partis tranquillement, traversant la ville, et j'ai commencé à me sentir euphorique, pleine d'énergie, excitée par le challenge, plaisantant, faisant semblant de partir en courant, la Crazy French Frog quoi...
puis nous avons enfin quitté Barcelona, appréciant de jolies vues sur la ville,
Tout le monde était heureux, souriait, plaisantait,
Le parcours était franchement magnifique. Nous avons tout d'abord rejoint le parc de Collserola, nous rapprochant de Tibidabo,
Le premier test était une envolée de 400 marches environ qui ont déjà laissé quelques traces sur certains d'entre nous...
puis nous avons longé un très joli étang, et admiré la végétation qui était luxuriante.
Le premier ravitaillement s'est fait au soleil, où nous avons mangé oranges, citrons, fruits secs, patisseries que nous avons descendus avec des boissons énergétiques.
puis nous avons continué la route sur un très bon rythme,
Nous sommes arrivés au deuxième stand juste avant le crépuscule ou l'on nous a servi le même type de ravitaillement. Nous avons commencé à mettre pulls et pantalons car la fraîcheur commencait à se faire sentir.
Armés de frontales, on a repris la route, suivant les pancartes réfléchissantes, les cherchant et parfois ne les trouvant pas... il y eut des descentes un peu périlleuses et des dérapages involontaires dans les bois humides avec l'obscurité de la nuit.
Le troisième ravaillement était censé être celui des sandwiches.. sauf que nous sommes arrivés dans les derniers donc il ne restait que ceux au chocolat (pas trop triste sur ce coup, la Soph!). Nous avons quand même apprecié une bonne soupelette chaude, du chocolat chaud et café. Un peu de repos et c'était reparti. Notre groupe s'est alors scindé en deux. Je suis partie devant avec Lloyd alors que Paul et Alex restaient en arrière avec Ana. Lloyd et moi avons commencé à sentir un vieux coup de barre et avons mangé une orange qui nous a remis sur le coup et permis de grimper sans problème la prochaine montagne, alors que nos pensées étaient centrées sur ce fameux stand illégal dont on nous avait parlé, avec sandwichs de jambon Serrano et cava, la spécialité d'ici, un vin pétillant... une fois de plus, nous sommes arrivés trop tard et la seule chose que nous avons vue, ce sont les voitures qui repartaient! Au prochain ravitaillement, j'ai commencé à avoir mal aux pieds... des ampoules commencaient à se former, lentement mais surement après 32km de marche...
Nous nous sommes arretés plus longtemps cette fois et j'ai senti que ce n'était pas une bonne idée car j'ai commencé à avoir froid et surtout, mes jambes ont eu du mal à se remettre en marche. En plus, histoire d'aggraver la chose, cette portion était plutot déprimante, nous faisant traverser des routes, villages déserts et zones industrielles. Le seul truc marrant était que lorsqu'on apercevait des gens au loin, on savait qu'ils faisaient partie de la marche... à cette heure de la nuit, qui aurait voulu faire une petite balade dans une zone industrielle ?:-))) Une agréable surprise nous attendait au ravitaillement suivant, kilomètre 39... comme il était tenu par des jeunes, ils avaient amené une radio et on a donc eu droit à de la musique pendant notre pause. On a même commencé à danser quand la fameuse chanson à la mode du moment ‘tonight’s gonna be a good night' est passée... je ne sais pas si c'était fait exprès, mais en tout cas, ca nous a donné de l'énergie et nous a remis en selle!
Les garcons alternaient entre eux pour marcher avec Anne, très fatiguée et pour porter son sac, et c'était maitenant le tour d'Alex de marcher avec moi devant. Cette partie du parcours était superbe, nous nous rapprochions des montagnes et on pouvait apercevoir de grandes roches, des ponts en constructions et rivières dans des vallées encaissées...
Le ciel s'éclaircissait et les couleurs faisaient leur apparition...
C'est aussi le moment qu'a choisi mon adducteur pour me faire mal, au point que j'ai cru avoir un bâton dans la jambe... j'ai alors essayé de moins le solliciter et de m'appuyer plus sur le muscle de devant pour le soulager. Alex m'a ensuite massée en arrivant au ravitaillement prochain alors que le soleil se levait.
On pouvait voir les gens commencer à marcher avec difficulté, un peu comme des petits vieux, et s'asseoir avec effort... On marchait depuis près de 13/14 heures et cela commencait à se faire sentir... je crois que c'est pour cela que nos chers 'ravitailleurs' avaient prévu la bouteille de whisky. J'en ai pris une lampée pour me redonner du coeur à l'ouvrage et me réchauffer avant de reprendre la route. Prête à partir, d'autres marcheurs qui devaient m'avoir vue en train de me faire masser, m'ont demandé si je continuais, ce à quoi j'ai répondu que même si je devais en mourir, je n'abandonnerais pas! Ils m'ont encouragée car eux s'arretaient là. Me revoilà à nouveau en route, seule cette fois car j'avais froid, et je sentais que si je ne partais pas tout de suite, je n'aurais pas la force de marcher et ça serait plus difficile encore. De plus, je savais que je serai désormais plus lente et qu'ils pourraient me rattraper. Le jour était maintenant levé et on pouvait apercevoir Montserrat, près... mais si loin à la fois! Ce qui était frustrant était de s'en éloigner car bien sûr, le chemin n'allait pas tout droit et on devait contourner des montagnes... c'était mentalement difficile à accepter quand tout ce dont on avait envie, c'était d'arriver!
En plus Lloyd m'a rattrapée et dépassée... puis c'était le tour de Paul, qui m'a d'ailleurs chopée en train de bailler...
Le plus dûr était de descendre, je commencais à envier sérieusement tous ces gens qui avaient pris des bâtons, quelle aide précieuse ce devait être! Et moi qui en avais un à la maison, très utile là-bas Soph! J'ai quand même continué à avancer, me rapprochant peu à peu...
J'ai rattrapé Paul qui s'était arrêté pour attendre Alex et Ana. J'ai continué à descendre, pensant que je devais forcement être proche du dernier ravitaillement. Quand j'ai aperçu la route, des maisons et des voitures, je l'ai joué prudente, m'interdisant de croire que ce pouvait être le dernier ravitaillement, et j'ai bien fait!!! Il a fallu que je marche encore 3/4 d'heure pour finalement arriver au pont où ils l'avaient installé.
Là-bas, pas de Lloyd. Il avait continué et j'ai sentir le désespoir me gagner, avec une envie folle de prendre le téléphérique pour la dernière partie. Mais la combattante que j'avais à l'intérieur s'est révoltée et m'a dit que je pouvais y arriver. Il n'était que 9h45 du matin et j'avais largement le temps pour arriver avant midi... Malgré cela, mon corps s'est révolté à l'idée de continuer... je me suis désaltérée car j'avais fait l'erreur fatale de jeter ma bouteille au dernier stop et n'avait rien bu depuis 8 km! J'ai mangé du chocolat, du turron, des pâtisseries, des fruits et ai commis une deuxième grosse erreur: j'ai enlevé mes chaussures... mes orteils étaient tellement à l'étroit que ça me faisait un bien fou... jusqu'à ce que je voie les ampoules... seulement 7 et pas très grosses mais quand même! J'ai mis des pansements et ai immédiatement regretté d'avoir enlevé mes chaussures en les remettant... les ampoules et ma fatigue rendaient chaque pas encore plus douleureux que cela ne l'était avant de m'arrêter! J'ai serré les dents et ai traversé le pont. J'ai enlevé mon pull, mis mon short, relevé mes cheveux pour attaquer le dernier troncon, constitué uniquement de montée jusqu'à la fin, avec en prime le soleil qui tapait... j'étais en colère, j'en avais ras le bol de marcher et voulais que ca se termine. Je me suis sentie comme une guerrière.
Croyez moi ou non, cette partie, je l'ai survolée, ne voulant meme pas m'arrêter pour reprendre mon souffle. J'ai continué à dépasser des gens, sur un rythme régulier, pas après pas, sentant mon coeur battre tres vite et mes joues se rapprocher de la couleur mauve... puis le plus dûr me tomba dessus. Des escaliers sans fin... des marches hautes, trop hautes! Heureusement qu'il y avait une rampe, à laquelle je me suis accrochée pour me lever. Une fois de plus, il nous a fallu faire le tour de la montagne pour arriver en haut et j'ai cru que le supplice ne finirait jamais. Je pouvais apercevoir les gens tout en haut et ai continué jusqu'a rejoindre la place du funiculaire. Il n'y avait personne de la marche, ni de stand...
Je suis allée demander à la dame des renseignements dans sa guitoune qui m'a indiquée les escaliers... carramba, encore des marches!!! Avec le reste de colère que j'avais, j'ai gravi les marches en courant, levant les bras en signe de victoire lorsque j'ai atteint le stand, trop contente d'avoir terminé... Les gens se sont mis à applaudir, ce qui était justement ce dont j'avais besoin. Je me suis sentie réconfortée, récompensée, cela faisait un bien fou à l'intérieur! En demandant l'heure, j'ai été surprise d'apprendre qu'il n'était que 11h, donc il m'avait fallu seulement 1h pour grimper d'en bas, ce qui était super rapide quand on pense que j'avais déjà 60kms dans les pattes!
Lloyd était allongé par terre, les jambes en l'air, se reposant... Il était aussi épuisé que moi et me raconta qu'il avait préféré ne pas m'attendre car il pensait qu'il n'aurait pas ensuite le courage de repartir. Il s'était arrêté seulement 2mn et avait continué.
Puis notre trio est arrivé, Ana entre Paul et Alex. Ils étaient tellement épuisés et soulagés d'arriver qu'ils en avaient des larmes plein les yeux. Je suis allée les prendre dans mes bras, et me suis sentie très émue aussi. J'étais trop contente qu'Ana ait réussi à terminer car je pensais honnêtement qu'elle n'arriverait pas à surmonter la dernière partie. Les garcons ont été admirables, la soutenant et portant son sac, un vrai travail d'équipe!
Je me suis sentie alors très égoiste et individualiste sur ce coup là...
Nous sommes restés près d'une heure à nous reposer, buvant et manger, discutant de cette expérience.
Puis ils sont allés brûler un cierge et nous avons fait un cercle autour de la place de l'église, supposée contenir une énergie spéciale. Nous nous sommes donnés la main et avons fermé les yeux. Je me suis sentie bien, en paix, heureuse d'avoir partagé cette experience avec eux.
Quelques verres et snacks plus tard, nous avons pris le train pour rentrer sur Barcelona. Nos yeux se fermaient, nos corps demandant la fermeture complète mais il restait une heure et demie avant d'arriver.
Nous nous sommes dit au revoir dans le métro. J'ai fini à bicyclette (juste 10mn!), ai mangé quelque chose de léger, pris une douche, massé mes gambettes, et me suis mise au lit à 5h de l'aprem pour me réveiller à 8h du soir, manger des pâtes et me repieuter à 21h jusqu'au lendemain 7h quand le réveil a sonné.
Quelle expérience!
- Oui, tout comme je le pensais, cette marche m'a fait atteindre mes limites
- Oui, j'y suis arrivée mais j'étais en forme, faisant du sport de facon régulière. D'autres personnes ont eu beaucoup plus de mérite que moi de finir. Ana pour commencer, qui a bien plus souffert que moi et est pourtant allée jusqu'au bout. J'ai aussi croisé des gens qui marchaient seuls et d'autres qui étaient âgés de 60 ans au moins!
- Oui cette experience a prouvé que bien que notre corps dise ‘non je n'en peux plus’, notre tête est la plus forte et nous fait continuer, trouvant d'incroyables ressources à la fin alors qu'on est pratiquement au bout du rouleau...
- Oui, c'était une tres belle marche, offrant de magnifiques paysages sur Barcelona, des étangs, bois de tous types, à la végétation tropicale et méditerranéenne
- Oui on s'est bien amusés, on a rigolé, plaisanté, mais on a aussi beaucoup souffert
- Oui, c'était une expérience collective très intense à partager avec des amis et d'autres qu'on ne connaissait même pas au début mais à qui on restera lié après cela
- Non, je ne le ferai plus jamais !!!
Pour toutes ces raisons, je suis contente d'avoir fait cette marche car j'ai vécu des moments inoubliables avec des amis. Merci Alex, Ana, Lloyd et Paul, pour votre aide et votre amitié. A bientôt pour de nouvelles aventures... mais cool cette fois ok? :-)))
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